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Lemonde a écrit :L'Afghanistan produira 92 % de l'opium mondial en 2006
LE MONDE | 04.09.06 | 14h11 • Mis à jour le 04.09.06 | 14h11
Malgré plus de 2 milliards de dollars dépensés par la communauté internationale pour lutter contre la drogue, l'Afghanistan bat en 2006 tous ses records, avec un accroissement de la production d'opium de 49 % et une augmentation des surfaces cultivées de 59 %.
Selon le rapport annuel de l'UNODC (Bureau des Nations unies de lutte contre la drogue et le crime) rendu public samedi 2 septembre, la récolte prévue - 6 100 tonnes d'opium, un chiffre très largement supérieur à celui de 1999, année record sous le régime des talibans, avec 4 565 tonnes - représente 92 % de la production mondiale et excède de 30 % la consommation. Quelque 165 000 hectares de terres, soit environ la moitié des zones irriguées, ont, cette année, été cultivées pour l'opium, contre 104 000 hectares en 2005.
"Les nouvelles sont très mauvaises et, dans les provinces du Sud, la situation est hors contrôle", a affirmé, samedi à Kaboul, Antonio Maria Costa, directeur de l'UNODC. Dans la province d'Helmand, où sont déployés 3 000 militaires britanniques, les surfaces cultivées ont augmenté de 162 %.
M. Costa s'est dit persuadé que "le lien entre l'insécurité et la culture du pavot est la clé, au moins dans les provinces du Sud". "Nous avons des preuves que les insurgés protègent les convois en échange d'une part du revenu de la drogue", a-t-il souligné, expliquant aussi que les rebelles, d'une manière très subtile, poussent les paysans à cultiver l'opium pour provoquer une réaction officielle et ainsi s'attirer de nouvelles recrues.
M. Costa, qui s'est rendu à de nombreuses reprises en Afghanistan, a insisté aussi sur la "corruption" comme explication majeure à l'accroissement de la production. "Nous avons des gouverneurs impliqués, des policiers, des militaires, des administrateurs provinciaux", a-t-il dit. En réponse à une question sur le renvoi du précédent gouverneur d'Helmand, Sher Mohammad Akhund, nommé en compensation par le président Hamid Karzaï au Sénat, M. Costa a affirmé : "J'ai demandé publiquement au président que les officiels corrompus ne soient pas renommés ailleurs mais écartés. Cela dit, nous n'avons pas beaucoup d'exemples de cela et nous espérons que des initiatives plus volontaristes seront prises dans ce domaine."
PRISON DE HAUTE SÉCURITÉ
Rappelant que la communauté internationale avait construit, à la prison de Pul-i-Charki, une aile de haute sécurité comportant 100 lits, M. Costa a appelé le gouvernement à "arrêter et juger les 100 plus sérieux trafiquants et cultivateurs d'opium. Nous proposons de saisir leurs biens et de les redistribuer au peuple, en particulier la terre", a-t-il dit, insistant : "Nous voulons que ces 100 lits soient occupés dans les prochains mois." M. Costa a toutefois exprimé sa "crainte que la prison de Pul-i-Charki ne soit occupée que par de petits trafiquants. Nous devons nous rappeler - et peut-être rappeler à nos partenaires afghans - que cette prison de haute sécurité a été installée seulement pour les très gros cas et que ce sont ceux-là que nous voudrions voir traités et remplir les lieux."
Les tribunaux mis en place avec l'aide de la communauté internationale, qui a formé et entraîné une police spéciale et des juges, ont jusqu'à maint1ant traité 600 cas dont 400 ont été jugés. Mais quasiment tous concernent des chauffeurs et de petits trafiquants. Ministre afghan de la lutte antidrogue, Habibullah Qaderi contredit les espoirs de M. Costa. "J'espère que nous pourrons faire quelque chose, mais je veux être réaliste. Contre les "gros poissons", nous devons avoir des preuves, et seulement à ce moment-là nous pouvons les traduire en justice. Cela prendra du temps et, pour l'instant, le gouvernement afghan n'a pas les moyens de trouver où sont leurs biens, le montant de leur portefeuille, leurs moyens de communications", a-t-il dit, se contentant d'appeler encore la communauté internationale à l'aide. Selon les experts, toutefois, plus que de moyens, c'est de volonté que les autorités afghanes ont besoin pour commencer à freiner un phénomène qui risque de détruire le pays.
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Le Pentagone évoque la possibilité d'une "guerre civile" en Irak
Le Pentagone a publié, vendredi 1er septembre, un rapport qui indique que "les conditions qui pourraient mener à une guerre civile sont réunies en Irak". C'est la première fois que la situation est officiellement dépeinte de façon aussi sombre. Le terme de "guerre civile" fait l'objet d'un vif débat à Washington. Le président George Bush l'a encore réfuté, jeudi, en affirmant que "seul un petit nombre d'Irakiens est engagé dans la violence intercommunautaire".
Selon ce rapport rédigé à la demande du Congrès, le nombre hebdomadaire d'attaques a augmenté de 15 % en trois mois et celui des victimes irakiennes - civiles et militaires - de 51 %. Le bilan est de 3 000 morts par mois, dont les deux tiers dans des violences interconfessionnelles. La morgue de Bagdad a reçu 1 600 corps en juin et 1 800 en juillet, dont 90 % portaient des traces d'exécution. "Le conflit central s'est transformé en un combat entre les extrémistes chiites et sunnites pour contrôler les secteurs clefs de Bagdad et détourner les ressources économiques. Les escadrons de la mort et les terroristes sont enfermés dans des cycles de violence qui se renforcent mutuellement", explique le texte.
Parallèlement, l'insurrection sunnite reste "puissante, même si sa visibilité a été éclipsée par l'accroissement de la violence confessionnelle". La violence journalière des attaques à Bagdad reste inchangée malgré le lancement le 14 juin de l'opération de sécurisation.
Le rapport accuse l'Iran et la Syrie de miner le gouvernement irakien en fournissant "un soutien actif et passif aux forces antigouvernementales qui tendent à attiser les tensions ethniques". Il détaille les activités des différents groupes et leur statut, indiquant qu'il devient "difficile de distinguer les activités conduites par les groupes criminels, terroristes et insurgés", tous étant "engagés dans les enlèvements, extorsion de fonds, attaques et autres crimes". Malgré la mort du chef de sa branche irakienne, Abou Moussa Al-Zarkaoui, Al-Qaida reste capable d'opérer grâce à "sa structure de commandement en cellules semi-autonomes".
Intitulé "Mesurer la sécurité et la stabilité en Irak", le rapport indique néanmoins qu'il n'y a pas de guerre civile "au sens strict". Sa diffusion a fait dire aux démocrates que M. Bush, connu pour son optimisme, était "rattrapé par la réalité"